lundi 5 mars 2018

ÉMOTIONS LIÉES A L'ESPACE : home!





[There's no place like home.]







En conversation avec une amie, celle-ci me dit : "c’est facile, l'habitat en pleine conscience pour ceux qui vivent heureux dans leurs maisons, mais ça ne joue pas dans d'autres situations. Je connais des tas de gens qui…, tiens, ma collègue dont les voisins du dessus ont trois petits enfants particulièrement agités…"

Cette remarque m’a laissée songeuse.

Tout d’abord, cette expression : "c’est facile pour…". Avons-nous déjà remarqué combien ces mots peuvent être paralysants, anesthésiants ? Surtout quand on les utilise à propos des autres, car, bien évidemment, c’est pratiquement toujours pour les autres que c’est facile…

Je me suis tournée vers mon amie et je lui ai répondu que non.

Non, je ne partageais pas son point de vue : la pleine conscience de ce que nous vivons dans notre habitat, cela concerne tout le monde, dans quelque lieu que ce soit. Parce qu’elle concerne la réalité de ce qui est là.

Irait-on dire que le scannage corporel est réservé aux gens en bonne santé, jouissant de tous les avantages d’un corps séduisant et performant ? Certes non. Car le fait d’être conscient de ce que l’on vit au présent, moment après moment, n’a rien à voir avec un monde parfait.

En ce qui concerne nos logements, nous pouvons y expérimenter toute une palette d'émotions, qui vont du contentement à la frustration. Ainsi, ils peuvent être pour nous des abris, des coquilles, des nids, des lieux de ressourcement.


Passant à l'autre extrême, il est possible aussi qu'ils soient vécus comme désolants, attristants, bruyants, désespérants. On peut s’y sentir coincé, mal entouré, enfermé. On peut ressentir l’envie de s’en évader, de partir, de les quitter. On peut les trouver vétustes, ennuyeux, trop chers, inadaptés, étriqués, mal insonorisés. On peut ressentir de l’aversion envers ceux avec qui nous devons les partager ou éprouver le manque de ceux qui nous ont quittés. Nous pouvons être exaspérés par notre voisinage, sonore ou humain.

(je pourrais continuer cette liste encore longtemps, mais je ne dispose pas de toute la journée…)

Ce que propose la pleine conscience, ce n'est pas l'exploration et la découverte d'un monde idéal. Pas à pas dans notre habitat, nous allons à la rencontre de ce que nous y vivons. Nous nous permettons de faire l’expérience directe de ce qui est. A ce propos, voici une citation de Jon Kabat-Zinn :


[Fondamentalement, le défi de la pleine conscience est de réaliser "C’est ça". Cet instant-ci est ma vie.

La question est : "Quelle va être ma relation à ma vie ? Ma vie m’ "arrive-t-elle" automatiquement ? Suis-je totalement prisonnier des circonstances ou de mes obligations, de mon corps ou de ma maladie, ou encore de mon histoire ? Suis-je hostile, défensif ou déprimé quand certains "boutons" sont activés ? Heureux si on pousse sur d’autres ? Effrayé si quelque chose d’autre arrive ? Quels sont mes choix ? Ai-je des options ? "] *



Et ce faisant, conscients, vivants, nous pouvons nous affranchir de nos idées reçues, de nos aversions, de nos points de vue étriqués pour acquérir plus de liberté, nous ouvrir à des possibilités

Le monde des possibles n’est certes jamais idyllique (du reste, il n'a pas à l'être) mais il s’offre à nous et à travers cette porte ouverte nous pouvons sonder le réel, examiner ses tenants et aboutissants, nous diriger vers telle ou telle option.


*Au cœur de la tourmente, la pleine conscience, Jon Kabat-Zinn, J’ai lu, p. 261

Images : There is no place like home / Ken Lum / MUMOK / Vienne / 2017


3 commentaires:

  1. Coucou. Je me rappelle de mon ancien appartement. Je devais m'y réfugier pour fuir le quotidien professionnel devenu trop pesant. Mais ce n'était pas un refuge calme. J'étais sans cesse dérangée. Et je me disais que je devais changer. Et puis le changement a été subi. Il faut maintenant l'intégrer et repartir autrement. Aujourd'hui, le nouveau logement est devenu comme un rempart. Une fenêtre ouverte sur la nature mais également un lieu dans lequel je me concentre en essayant de comprendre et où je prends soin de moi. L'autre jour, j'écoutais une femme qui disait qu'elle n'osait plus sortir de chez elle. Je me demandais simplement si son chez soi était agréable ou bien si là aussi, elle souffrait des atteintes du monde extérieur. Je l'espère pour elle. Belle journée.

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  2. Hello, Dédé,
    Ce que tu racontes sur ton ancien appartement, beaucoup de gens le vivent. On voudrait tous que notre logement soit un abri, un lieu de ressourcement, de récupération contre les agressions en tous genres de notre vie (un « rempart » comme tu le dis si bien). Mais la plupart du temps on n’est pas toujours dans des conditions d’habitat rêvées (diverses pollutions, sonores ou atmosphériques, voisinage déplaisant, pas toujours ouvert au dialogue, marché immobilier emballé).
    Le plus important, c’est de pouvoir éviter l’impression de se sentir « coincés», sans options possibles. Parce que cela va nous désespérer, nous rigidifier sur notre souffrance et nous empêcher de rechercher des solutions.
    En étant conscients de ce que nous vivons, de ce qui nous pèse, de comment notre corps réagit, et des émotions dont nous faisons l’expérience, nous pouvons identifier nos besoins, et, les ayant reconnus, rechercher des options possibles.
    Ça peut sembler simpliste de le dire comme ça, mais je crois qu’une fois qu’on a identifié ce qui ne nous convient pas et ce dont on a besoin, des capacités créatives en nous se mettent en marche. A mon avis, on sous-estime les forces d’innovation et de changements positifs dont nous sommes capables (tu parles en ce qui te concerne d’un changement subi et en même temps il a été l’occasion de trouver le logement « ouvert sur la nature » qui te manquait).
    Quant à cette femme dont tu parles, si elle n’ose » plus sortir de chez elle, c’est que probablement le monde extérieur est devenu trop agressif pour elle. Elle se sent sans défenses à l’extérieur. C’est un peu inquiétant, non, le fait de ne plus oser sortir ? Les coquilles servent à se protéger, mais il y a des moments où l’escargot doit avancer, partir à la découverte, s’ouvrir au monde.

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    1. Oui... je pense que c'est inquiétant de ne plus avoir envie de se "frotter" au monde. Cela dénote une grande tristesse.

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