mercredi 26 décembre 2018

EXPÉRIENCES : l'intelligence du corps




Dernièrement, une émission de Xenius, sur Arte, nous rendait attentifs à toutes les formes de pollution atmosphérique auxquelles nous sommes exposés entre nos quatre murs. 
Cela peut sans doute paraître étonnant, cependant nous sommes davantage confrontés à cette forme de pollution à l'intérieur de nos maisons qu'au dehors. Parmi les principales sources de pollution, nous trouvons :

L'humidité (sous forme de moisissures, d'algues, de lichens). Ces nuisances peuvent donner lieu à toutes sortes de problèmes de santé : allergies diverses, infections, problèmes des voies respiratoires, etc. 
Les produits chimiques, tels que des colles ou des vernis, utilisés dans la construction ou l'aménagement. A titre d'exemple, il est de plus en plus rare de trouver des meubles en bois véritable, nous avons affaire à des bois agglomérés qui contiennent toutes sortes de matières toxiques.
Les produits de nettoyage. Ils peuvent renfermer de nombreuses substances agressives pour l’organisme. Sans oublier les parfums d'ambiance, les bougies, les bâtonnets d'encens et autres éléments de décoration, tels les textiles, dont les composants contribuent eux aussi souvent à la dégradation de notre air ambiant. N'oublions pas que si nous sommes en bonne santé, nos maisons ont un besoin modéré de nettoyants et de désinfectants.
Les occupants. Leur respiration dégage du CO2, leurs diverses activités de la vapeur. Est-il besoin d'évoquer les effets néfastes du tabac dans nos intérieurs ?
Le monoxyde de carbone. Une molécule qui peut provoquer diverses intoxications, si nous cuisinons au gaz, si nous avons une cheminée ou un poêle dans notre salon.
La pollution électromagnétique. Les appareils toujours plus nombreux que nous accueillons soumettent notre organisme à des stress importants.
Enfin, le radon, un gaz radioactif présent dans l'atmosphère à des taux infimes, mais qui peut se révéler fort dangereux quand il se trouve dans le sol d'une maison. 



Face à ces fléaux, le premier et le plus efficace réflexe que nous puissions avoir est naturellement d'aérer régulièrement les locaux que nous occupons. Il est vital de penser à ventiler (et si possible à des moments où l'air provenant de l'extérieur est le plus sain, par exemple en tout  début de matinée, après le ressourcement nocturne). 
Relevons que l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) consacre à ce sujet plusieurs pages de son siteIl fourmille de conseils clairs et détaillés.

La Baubiologie (terme allemand) est une discipline qui fait ses preuves en Allemagne et qui commence à être reconnue en France, où elle n'a pas encore d'appellation précise, mais que l'on pourrait appeler "écologie du bâtiment". Elle est à même d'évaluer le niveau de salubrité de nos logements en identifiant les polluants de toutes sortes. Elle traque et met à jour les risques de respirer de l’air vicié dans notre habitat.

Bien sûr, ces recherches et les nouvelles technologies qui leur sont liées nous sont extrêmement utiles. Elles peuvent contribuer à notre bien-être en nous rendant attentifs aux diverses sources de pollution possibles et nous aider dans leur prévention. 

Il est aussi important de relever qu'un recentrage sur notre vécu corporel et sensoriel dans nos maisons peut nous être d'un grand secours. En pratiquant naturellement la pleine conscience quand nous sommes chez nous, nous nous rendons attentifs à tous nos sens. Nous sommes présents à ce que nous ressentons, à ce que nous respirons, à ce que nous entendons. Toutes ces perceptions peuvent nous apporter de précieux indices sur nos expériences, en interaction avec notre environnement. Ainsi, nous pouvons participer instinctivement à améliorer notre santé. Profitons donc du précieux travail de détection effectué par nos organes. Notre peau, nos yeux, notre gorge, nos poumons sont là pour nous fournir d'utiles indications.

Pour cela, soyons attentifs à ce qui se passe dans notre corps quand nous sommes chez nous. Au cours de nos méditations formelles et informelles, d'essentielles indications nous sont données. 

Avec ces alliées, nous pouvons agir très pratiquement. Par exemple : en éliminant l'emploi de produits d'entretien dont l'odeur nous semblerait désagréable, voire agressive, pour les remplacer par des détergents plus amicaux (des produits bios ou même les "bonnes vieilles recettes de grand-mère", qui sont efficaces et bien moins chères). En faisant appel à notre odorat, pour déceler des émanations de moisi ou de renfermé potentiellement nocives. En écoutant les signaux de notre corps, qui, par des maux de tête, par des vertiges, même légers, pointe les situations où quelque chose est en train de nous nuire.  En identifiant des endroits de notre logement où nous nous sentons incommodés, afin de nous interroger sur leur origine et être en mesure d'agir positivement si nécessaire. 

De manière plus élargie, nous avons également la possibilité de considérer quel type d'éclairage nous convient et quel type nous est dommageable. Ou bien sentir le moment précis où l'usage d'appareils électroniques (lap tops, tablettes ou smartphones) a trop mis à contribution nos yeux ou bien a stressé nos cellules nerveuses, moment où il serait impératif de mettre un terme à l'activité en cours. 

Notre corps est bourré de compétences. Nous pouvons reconnaître son intelligence, constituée de mille réseaux de perceptions sensorielles. Nous pouvons nous fier à ses aptitudes et nous ouvrir à ces savoirs par des exercices d'attention réguliers. 

Entre autres bienfaits, la pleine présence à ce que nous expérimentons peut nous aider à assainir notre habitat. Oui. Il nous appartient de faire confiance à nos propres moyens de mesure et d'évaluation pour identifier comment vivre et respirer chez nous de la manière la plus favorable possible. 


Ce que cachent nos quatre murs / Xenius / Arte / disponible jusqu'au 23 février 2019

Images : The Walthamstow Tapestry / Grayson Perry / 2009 / Arken Musum 2017 / DK

lundi 10 décembre 2018

PAROLES DE... : gravir les marches


Utilisez les occasions qui se présentent habituellement dans votre maison pour être pleinement conscient de chaque moment présent : ouvrir la porte d’entrée, répondre au téléphone, sortir le linge de la machine à laver, aller au réfrigérateur, etc. Observez la pulsion qui vous précipite vers le téléphone, ou la sonnette dès la première sonnerie. Pourquoi votre temps de réaction doit-il être si rapide ? Êtes-vous capable d’effectuer ces transitions avec plus de grâce ? Pouvez-vous être là à n’importe quel moment ?
Jon Kabat-Zinn, Où tu vas, tu es 



Aussi longtemps que vous êtes éveillé, vous pouvez être dans la conscience. Conscience signifie vision de l’ensemble, perception de tout le contenu et de tout le contexte de chaque instant. Nous ne pouvons pas saisir cela entièrement par la pensée. Mais nous pouvons le percevoir dans son essence si nous passons au-delà de notre pensée, si nous accédons à la vision directe, à l’écoute directe et au ressenti direct.
Ainsi, l’attention vigilante consiste à voir et à savoir que vous êtes en train de voir, à entendre et à savoir que vous êtes en train d’entendre, à toucher et à savoir que vous êtes en train de toucher, à monter les escaliers et à savoir que vous êtes en train de monter les escaliers. Vous pourriez répondre : « Je sais bien sûr que je monte les escaliers quand je monte les escaliers, mais la Mindfulness signifie ne pas simplement le savoir comme une idée, mais être avec le fait de monter les escaliers, cela signifie en faire l’expérience consciente d’instant en instant.
En pratiquant de cette façon, nous pouvons nous dégager du mode de pilotage automatique et arriver progressivement à vivre davantage dans le présent et à connaître ses énergies plus pleinement. Puis, comme nous l’avons vu, nous pouvons répondre de façon plus appropriée au changement et aux situations potentiellement stressantes, car nous sommes conscients de l’ensemble et de notre relation à l’ensemble. Vous pouvez pratiquer ceci à tout moment où vous ne dormez pas. 
Jon Kabat-Zinn, Au cœur de la tourmente, la pleine conscience 

La vie quotidienne ne manque pas d’occasions de pratiquer la pleine conscience. Monter l’escalier en est une pour moi. […]
Je découvre que je suis souvent motivé par mon besoin d’être ailleurs ou par le prochain événement qui, selon moi, devrait se passer. Quand je me surprends à monter l’escalier quatre à quatre, il m’arrive d’avoir la présence d’esprit de m’arrêter en plein vol. J’ai conscience d’être légèrement essoufflé, que mon cœur bat la chamade ainsi que mon esprit, que toute ma personne, enfin, est habitée par une hâte dont j’ai souvent oublié l’objet, une fois arrivé en haut. […] 
Si l’urgence extérieure existe rarement, l’urgence intérieure, habituellement provoquée par l’impatience et une forme inconsciente d’anxiété – dont le processus est parfois si subtil que je dois écouter avec attention pour l’entendre, ou si violent, que pratiquement rien ne peut arrêter son élan. Cependant, la conscience de cette turbulence intérieure m’aide à ne pas m’y perdre à ces moments-là.  
Jon Kabat-Zinn, Où tu vas, tu es  


[...] faire de votre vie la vraie pratique de sorte qu’il ne s’agisse plus simplement de confiner la pratique formelle à un créneau régulier, mais de vouloir appliquer la pleine conscience à chaque moment, peu importe ce que vous faites ou ce qui se passe, jusqu’à avoir le sentiment au bout d’un certain temps que c’est la pratique qui vous fait plutôt que le contraire.
Jon Kabat-Zinn, L'éveil des sens 

Nécessité de revenir régulièrement aux livres fondamentaux. Lire et relire les écrits de Jon Kabat-Zinn. Et à chaque relecture, y puiser quelque chose de nouveau, quelque chose de lumineux. Entrer dans ses textes avec, à chaque fois, notre regard du débutant. Découvrir comme pour la première fois que la vie est faite d'une suite d'instants. Que ceux-ci appartiennent à la pratique formelle ou qu'ils relèvent de la pratique informelle, peu importe. Que l'on soit présent, assis sur un coussin ou montant et descendant des escaliers, cela n'a pas de différence fondamentale : ils font tous partie de notre vie. 

Notre vie est un tout, et dans ce tout, les moments que nous consacrons à la méditation, les moments où nous nettoyons notre maison, les moments où nous y arrivons avec le besoin de nous reposer, les moments où nous grimpons des escaliers (métaphoriques ou bien réels), tous ces moments appartiennent pleinement à notre existence.

Images : Rovinj / Croatie // Korcula / Croatie // Deia / Majorque

copyright © daniela dahler 2018