Au bout du fil: un consultant en entreprise. Il m’a appelée pour me parler de ce travail sur l’habitat en pleine conscience. Au cours de notre entretien, il me demande : "Vous croyez que votre travail, il pourrait intéresser des cadres ?". Je visualise un groupe de messieurs et de dames en costard foncé, désireux d’apprendre à mieux gérer leur stress face à toutes les décisions et responsabilités importantes qu’ils doivent prendre chaque jour, disposant de peu de temps et dans la nécessité de le rentabiliser.
Trop vite,
sans doute, sans m'accorder une pause, je réponds :
« Non, je ne crois pas ». Non,
sur le moment, je ne conçois pas que ces
exercices, ce temps consacré à respirer chez soi, cette attention aux choses du
quotidien, puissent toucher des personnes évoluant en mode "gestion" dans leur milieu professionnel. Comment, du reste, leur expliquer le lien ?
En
raccrochant, pourtant, je me reprends. Je peste contre cette habitude
qui est trop souvent la mienne de réagir impulsivement, sans prendre le temps d’une respiration. Je peste, car tout à coup il me paraît évident que la question de
l’habitat n’a rien à voir avec tel ou tel corps de métier. Et surtout, qu’une
démarche en pleine conscience n’a rien à voir avec les responsabilités que l’on
assume dans la société.
Se
sentir "arrivé" quand on franchi le seuil de sa maison, se sentir chez
soi relève d'un état d’esprit, d'une attitude sans rapport avec un quelconque
statut.
Je peux
imaginer même que, si notre travail nous amène à quitter notre domicile tôt le
matin, et que l’on y rentre tard le soir, épuisé, exténué par de fastidieux problèmes et par des relations qui ont pu être conflictuelles durant toutes ces longues heures, on a d’autant plus besoin de pouvoir se poser et se reposer.
Je peux imaginer aussi qu'il est possible de se sentir mal à l’aise dans un logement de 250 mètres carrés, derrière une haie de thuyas, dans une rue calme, tellement calme que l’on s’y sent isolé. Et le montant du loyer que l’on verse chaque mois, la marque du divan sur lequel on va s’asseoir, le standing du quartier où l’on habite n’ont que peu d'impact sur cette réalité : nous avons tous besoin d’un lieu où être, où nous sentir en sécurité.
Je peux imaginer aussi qu'il est possible de se sentir mal à l’aise dans un logement de 250 mètres carrés, derrière une haie de thuyas, dans une rue calme, tellement calme que l’on s’y sent isolé. Et le montant du loyer que l’on verse chaque mois, la marque du divan sur lequel on va s’asseoir, le standing du quartier où l’on habite n’ont que peu d'impact sur cette réalité : nous avons tous besoin d’un lieu où être, où nous sentir en sécurité.
Alors,
oui, l’exploration de leur habitat, le temps consacré à faire de leur maison un
lieu de non-agir et de bien-être, oui, cela peut intéresser… même des
cadres !
Photographies : Portraits officiels, Leeuwarden Series / Rijksmuseum / Amsterdam
A Family beside the Tomb of Prince William in the Niewe Kerk, Delft / Dirk van Delen (détail)/ Rijksmuseum / Amsterdam
Photographies : Portraits officiels, Leeuwarden Series / Rijksmuseum / Amsterdam
A Family beside the Tomb of Prince William in the Niewe Kerk, Delft / Dirk van Delen (détail)/ Rijksmuseum / Amsterdam
Bonjour,
RépondreSupprimerLa vie de cadre n'est pas toujours facile, comme les nombreux brun-out dans cette catégorie professionnelle le démontrent : car ils sont souvent pris entre le marteau et l'enclume des cadres supérieurs et des collaborateurs et doivent assumer cette situation stressante.
L'équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée est d'autant plus important. Le travail peut tout simplement tout "engloutir". Donc oui, pour retrouver ou maintenir cet équilibre, nécessaire pour le long terme, cette respiration lors du retour chez soi est non seulement importante, mais nécessaire.
La question qui se pose est la suivante, est-ce que les cadres ne risquent pas simplement d'appliquer la bienveillance comme un protocole, une des méthodes de gestion des conflits ou du stress, comme celles apprises lors d'un des nombreux séminaires qui leurs sont consacrés et de ne pas faire réellement la démarche...
Paul Frédérick
Vous avez raison de le souligner, selon certaines études, les cadres compteraient parmi les catégories professionnelles les plus touchées par le stress. Beaucoup d’entre eux se sentent seuls et peu épaulés par leur hiérarchie. Ils disent avoir de la peine à s’autoriser de « déconnecter » pendant leurs congés.
RépondreSupprimerPourtant, se déconnecter des sources de stress et de tension est indispensable pour garder un équilibre de vie. La difficulté pour chacun de nous est de trouver un équilibre et des moments de récupération pour faire face. La méditation, comme d’autres apports tels que le sport, une bonne hygiène de vie, ou des relations enrichissantes, peuvent nous aider.
Quant à votre dernière remarque, qui concerne la manière de pratiquer la pleine conscience en entreprise, elle ne concerne pas que les cadres, ou tout autre collaborateur. Je pense qu’elle concerne tout un chacun : la pleine conscience n’est pas un protocole, ou une marche à suivre, ni une panacée qu’on applique en mode « faire ». C’est une manière d’être, qu’on cultive en soi, au fil de la pratique, formelle ou informelle. C’est une démarche qui ne peut pas être imposée de l’extérieur (en ce sens, ce serait tout à fait à l’opposé d’un cours programmé par l’entreprise). Elle relève d’une démarche personnelle. On peut la proposer dans le cadre d’une entreprise, mais certainement pas l’imposer. Il m’est difficile d’en dire plus, car je connais peu ce genre d’interventions.