vendredi 26 janvier 2018

EXERCICE / REGARD DU DÉBUTANT : faire connaissance


















[Il y a une naissance en toute connaissance.
Pascal Guignard *]


L’espace d’un moment, essayons de laisser de côté tout ce que nous pensons savoir sur notre maison. Il s'agit de nous débarbouiller les yeux, de changer de regard. Abandonnons la vision automatique que nous empruntons peut-être trop souvent quand nous abordons "notre" maison, "nos"murs. 

Plaçons-nous devant notre porte en imaginant que nous arrivons dans ce lieu pour la première fois. Adoptons une posture différente et, pourquoi pas, ludique : celle du néophyte, de l’apprenti, du débutant. Avançons comme un simple étranger. Un visiteur. 

Ouvrons la porte. Osons entrer. N'hésitons pas à faire connaissance avec les lieux. Quelles que soient les dimensions de notre logement, il sera un territoire à découvrir. Peu importe la grandeur et le nombre des pas que nous y ferons. L’essentiel est ailleurs. L’essentiel est dans la découverte.

Faisons des promenades dans notre intérieur, à petits pas, à grands pas. Que voyons-nous, là, aujourd’hui, chez nous ? Soyons conscient de ce qui s’offre à notre regard, moment après moment. Ayons les yeux de la première fois. 

*****

Pourquoi ne pas partir en exploration, comme un enfant ? Nous pouvons solliciter le petit enfant qui réside à l’intérieur de nous-même et lui demander de venir faire un bout de chemin avec nous, l’enfant qui aimait les découvertes et qui trouvait le moyen de jouer avec des cailloux ou des bouts de bois pendant de longs après-midis, celui qui savait s’extasier dans un territoire inconnu, une forêt, un jardin, une rue, et s’inventer des jeux à l'aide de trois fois rien. 


Partons en voyage.




Partons explorer coins et recoins.

N'hésitons pas à changer les points de vue.

Comme durant ces après-midi pluvieux où, petits,
nous inventions des aventures, nous devenions des rois,
des chevaliers, nous partions conquérir des territoires.

Découvrir des Amériques dans notre quotidien le plus banal.

S'étonner de l'ordinaire. Serait-ce une chose envisageable?

Serions-nous capables de retrouver ces jeux des après-midi pluvieux ?

*****


*Vie secrète, Folio, Gallimard, 1999, p. 153.
Photographies : L'aumône de Sainte Elisabeth de Hongrie (détail) / B. Schedoni / Museo Capodimonte / Naples
L’archange Gabriel avec Tobie entre les saints Nicolas et Jacques (détail) / GB Cima da Conegliano / Accademia / Venise

4 commentaires:

  1. Bonjour,
    J'ai pratiqué cet exercice et je me suis souvenu comment je regarde, découvre, un appartement nouveau, loué dans une autre ville, lors de voyages. On a beau avoir vu des photos, l'impression, une fois à l'intérieur, tout est autre et nouveau, les couleurs, les odeurs, la lumière, les bruits. Je suis donc rentré chez moi, avec cet état d'esprit. Le début est facile, utiliser le regard du débutant, de l'enfant aussi... du moins pendant un certain temps, mais ensuite le quotidien a réussi à reprendre le dessus. La facture, là sur la table, il faut la payer et ici... non le téléphone sonne... et voilà. Il faut reprendre, pas si simple que cela donc.
    Autre chose d'entendez-vous par changer les points de vue ?

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  2. Bonjour, Paul,
    C’est intéressant, de repenser à des locations de vacances, pour retrouver un regard nouveau chez soi. Oui, il y a quelque chose de ça : on entre, on est curieux, on découvre un lieu inconnu.
    La question de l’attention et de la peine qu’on a à la garder longtemps sur un objet est essentielle. Et normale, en même temps. Quand on se fixe sur un objet, notre attention est constamment appelée à dévier vers autre chose (c’est un phénomène courant durant la méditation,). A chaque fois, sans se dire qu’on n’y arrive pas, ou qu’on ne sait pas comment s’y prendre, on peut noter qu’on a été distrait de notre objet d’attention… et tout simplement revenir à ce qui nous occupe : notre relation à notre logement.
    Enfin, ce que j’entends par changer les points de vue, c’est de regarder en adoptant des postures différentes, par exemple, assis, debout, couché, allongé par terre. Ça peut aussi impliquer le fait de ne pas rester dans les coins où l’on se met habituellement (nous sommes des êtres d’habitude : on a tendance à occuper la même place à table, dans le lit, sur le canapé). En nous plaçant ailleurs qu’à l’ordinaire, nous pouvons percevoir les choses autrement, sous un autre angle. Ce qui change et enrichit notre regard. J’espère avoir répondu à vos questions, très bonne soirée à vous, Paul !

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  3. Pour une personne comme moi qui ne pratique que peu la pleine conscience, cet exercice a été une porte d'entrée idéale en la matière. Il y a à mon sens quelque chose de plus ludique et de moins contraignant à (re)découvrir son intérieur qu'à se forcer à se concentrer (uniquement) sur son corps. J'ai trouvé qu'étudier son ressenti et ses sentiments via son environnement était plus facile et - à mon sens - plus enrichissant ; je n'aime en définitive pas me focaliser sur mon corps dans l'abstrait.

    Cet exercice est en outre une invitation à redécouvrir son environnement, la façon dont on le conçoit et le perçoit. Même si ce n'est pas ici le sujet, je le verrais sans mal transposé à notre hall d'entrée, notre rue, etc.

    Enfin, les surprises ont été nombreuses avec cet exercice : j'ai ainsi découvert qu'inconsciemment, je ne mettais jamais les pieds dans certains coins de mon appartement. J'ai aussi repris conscience des volumes de celui-ci. Et puis, la décoration et l'ameublement n'avait par endroit pas de sens... J'ai corrélativement réalisé qu'il fallait que je me contraigne à ne toucher à rien, à ne rien entreprendre pendant l'exercice et à me focaliser sur mes impressions. Ça ne m'a évidemment pas empêché d'y repenser plus tard !

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  4. Bonjour, Unknown !
    Quand vous parlez de « se concentrer uniquement sur son corps », est-ce que vous voulez parler du scannage corporel, la méditation durant laquelle on fixe son attention sur l’ensemble de son corps, une partie après l’autre ? Le body scan vous semble difficile à pratiquer et vous concentrer sur votre logement vous permet de vous sentir « en pleine conscience » de manière plus aisée ?
    Les réactions face à la pratique de la pleine conscience varient selon les personnes. Pour certaines, le body scan peut être vécu comme difficile. Elles ont de la peine à maintenir leur concentration, en restant couchées, immobiles. Cela peut les irriter même parfois.
    On peut distinguer la méditation formelle (le BS par ex.) et les exercices de méditation informelle, durant lesquels on pratique la pleine conscience dans notre vie quotidienne.
    L’attention à son logement, qui invite à rester en pleine conscience d’une toute autre manière, en mouvement, peut en effet être plus ludique. Tant mieux si elle vous permet de vous centrer sur vos ressentis de manière accessible. Peut-être que vous cela vous permettra ultérieurement de pratiquer le body scan avec plus de facilité, qui sait?
    Votre deuxième remarque concernant l’observation attentive aux environnements plus larges est tout à fait intéressante. Je pense en effet que, une fois qu’on a commencé par l’écoute de ses ressentis chez soi, on peut prêter une attention élargie aux espaces en tous genres, publics ou autres.
    Quant à votre troisième remarque, c’est vrai, en développant le regard du débutant on se permet de faire pas mal de découvertes ! Et puis, vous relevez que on est tenté parfois d’agir en faisant l’exercice, mais que ce n’est pas le but : le but, c’est d’être présent, connecté, dans l’instant. Ensuite, une fois l’exercice effectué, on peut, comme vous le dites, y repenser et éventuellement : agir, entreprendre quelque chose. Merci pour ces précieuses remarques ! Très belle fin de journée à vous ! Daniela

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