lundi 30 mars 2020

RENTRER CHEZ SOI : rester chez soi



En ces temps agités où tant de choses nous portent à nous inquiéter, notre esprit est plus que jamais sollicité. Le présent nous préoccupe : Que se passe-t-il dans le monde, autour de soi et en soi ? Que faire pour bien faire et comment nous y prendre ? Comment gérer nos émotions et nos sentiments ? Le futur aussi nous interpelle : Quand tout cela retrouvera-t-il un état "normal" ? Quelles conséquences devrons-nous affronter ? Saurons-nous faire face, nous adapter, nous sauver ? Que risquons-nous de perdre et que pourrions-nous gagner ?
De toutes parts, nous parviennent des conseils, des invitations, des suggestions pour savoir comment nous organiser et structurer notre temps, pour savoir aussi comment rester connecté au monde extérieur, continuer de socialiser, établir des solidarités. Les médias et les réseaux sociaux servent de relais pour nous faire entendre les voix de spécialistes et de personnalités (ainsi que de toute personne désireuse de s'exprimer). Parmi toutes ces ressources, il nous est plus que jamais nécessaire de trier pour distinguer l'utile de l'inutile, voire du nuisible.
Ce billet est une brève invitation à observer ce que nous vivons, sans action immédiate, sans chercher de recours vers l'extérieur. Seulement : observer ce que nous sommes en train de vivre.



Que l'on soit seul pour affronter cette période tourmentée ou que l'on soit entouré (parfois avec le sentiment d'être "trop, beaucoup trop" entouré), nous nous retrouverons fatalement face à la question : comment est-ce que je me sens quand je suis "chez moi" ? (cela évidemment, si nous avons la chance d'avoir un habitat).
Comment nous sentons-nous quand il s'agit non pas de rentrer chez nous, mais d'être obligés de rester chez nous ? Comment vivons-nous ce moment où le recentrage et l'intériorité ne sont plus des options, mais des obligations? Simplement, rester chez soi : L'injonction est tellement simple qu'elle peut nous prendre au dépourvu, qu'elle peut nous affoler, parce qu'elle nous oblige à revoir en premier lieu cette réalité : sommes-nous capables de nous retrouver face à la personne que nous sommes?



Rester simplement chez soi : quatre mots qu'il nous appartient à présent d'habiter. Observons nos ressentis, nos émotions et nos impulsions. Sont-ils caractéristiques de cette période et en quoi ? Qu'est-ce qui nous inquiète et qu'est-ce qui nous rassure ? Observons comment nous respirons. Observons comment nous nous comportons. Notre emploi du temps est-il déjà établi de telle sorte que notre vie est aussi tendue et stressée qu'à l'ordinaire ? Si nous vivons du stress, à quoi tient-il ? Si nous éprouvons de l'ennui, de quoi est-il fait ? Si nous ressentons de l'angoisse, qu'est-ce qui la génère ?

En nous posant ces questions, nous nous permettons de prendre un peu de recul, de faire un pas de côté, de nous écouter (nous écouter en cette période où tant de voix s'élèvent peut être nouveau et très intéressant). Il est possible que ce moment particulier se révèle riche et nous fournisse beaucoup d'informations sur nous, sur notre entourage, notre monde, nos émotions, notre fonctionnement. Il peut aussi nous amener à porter un autre regard sur notre maison, ce qui lui est essentiel et ce qui lui est superflu, ce qu'elle nous offre et ce qui lui manque.

Cette période peut aussi nous permettre, pourquoi pas, de faire quelques exercices de présence qui se trouvent ici. A moins, bien sûr, que cette immobilisation forcée n'implique tant de nouveautés, tant de dérangements (tout un planning bien rempli) et que nous n'ayons déjà plus... de temps à soi.



Images :  Fabienne Verdier / exposée au Musée Granet / Aix-en-Provence / 2019
Lignes de crêtes / collection privée
Yuan : retour aux sources vives / Sigg collection /
Pèlerinage aux monts des intentions pures / Centre Pompidou / Paris

2 commentaires:

  1. Bonjour,
    nouvelle journée de confinement pour toutes et tous qui doivent rester chez eux. Je comprends parfaitement les gens qui dans leur petit logement au 4ème étage, sans balcon, avec des voisins pas toujours respectueux (peut-être ne le peuvent-ils pas...), commencent à trouver le confinement difficilement supportable.
    Mais, je plains ceux qui affirment, après à peine quelques jours de confinement ou semi-confinement, qu'ils "deviennent fou" lorsqu'ils restent à la maison ; c'est qu'il y a un problème structurel fondamental - qui peut être lié à soi, aux autres et/ou à son environnement direct - lorsque l'on ne peut demeurer durablement (quelques jours ou semaines) seul ou accompagné de ses proches dans l'endroit que l'on s'est (en général) choisi pour vivre. À ce sujet, j'émets notamment l'hypothèse que beaucoup de gens ont beaucoup investis dans des signes extérieurs de richesses (voiture, habits de marque, etc.), qui se révèlent inutiles en cette période, et se sont fort peu consacrés à leur intérieur (c'est-à-dire tant à leur for intérieur qu'à leur chez eux).

    Merci pour ce billet.
    Paul

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    1. Bonjour et pardon, cher Paul, car je découvre votre commentaire seulement aujourd'hui (une nouvelle lubie de Blogger sans doute...), aujourd'hui où la question n'est plus de comment se confiner, mais comment négocier le prétendu "retour à la normale"... désolée...
      Votre remarque sur la difficulté - les difficultés - de certains à accepter de vivre dans leur logement, avec des gens proches, appartenant à un entourage qu'elles se sont choisi, donne à réfléchir. Les personnes concernées ont peut-être eu l'occasion de remettre en question leurs choix de vie, s'ils s'en sont donné la possibilité ? Indépendamment de conditions d'habitat précaires ou défavorisées, en quoi le fait de passer du temps avec sa famille, son compagnon/sa compagne, ses enfants, en ayant un toit et de la nourriture à disposition, est-il une chose insupportable ou terrible ? En quoi le fait de vivre pendant quelques semaines seul en sa propre compagnie (en ayant des moyens d'information et de connexion assurés) est-il une épreuve douloureuse ? Graves et importantes questions, si l'on accepte d'y répondre avec honnêteté.
      Quant au fait d'investir dans les apparences et de ne pas savoir "être chez soi", c'est un problème lié à ce qui précède... il faut espérer que le temps à disposition a permis à certains de réfléchir et qu'ils ne sont pas en train de sortir du confinement tête baissée, sans rien apprendre, sans rien vouloir déranger... Belle fin de journée.

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