La Fondation Cognacq-Jay basée à Paris, décerne depuis quelques années un prix qui se veut un encouragement de l'innovation au service de l'intérêt général.
En 2018 il a été attribué à Faire avec, une association créée par trois architectes, Clotilde Buisson, Gwenaëlle Rivière et Clara Piolatto.
Par leur initiative, ces trois jeunes femmes ont décidé d'améliorer divers habitats précaires en utilisant des matériaux inexploités.
La
réalité de l'habitat précaire en France ce sont : deux millions de personnes
privées de confort, pas d'eau courante, ni de douche, pas de WC intérieur, ou
de coin cuisine, plus d'un million de copropriétaires en difficultés et trois millions
et demi de personnes ayant souffert du froid pour des raisons liées à la précarité
énergétique.
(d'après
les chiffres fournis par la Fondation Abbé Pierre en 2017)
Écoutons le témoignage de Clara Piolatto, une des trois initiatrices:
"On
récupère des matériaux qui sont généralement des non livrables ou des surplus
ou des rebuts de fournisseurs ou de chantiers. On vient récupérer ce qui
pourrait être mis à la benne. On récolte avant que ce soit mis à la
poubelle et que ça finisse en déchet. C'est du carrelage, du parquet, du papier
peint, de la finition, des lampes de chevet. On met en valeur les assemblages
de ces matériaux qui sont disparates, puisqu'on récupère sur différents points
de collecte, sur différents chantiers.
On
regarde ce qu'on a et on regarde avec les personnes concernées comment les
assembler en fonction de leurs besoins.
L'idée,
c'est vraiment de valoriser l'économie circulaire et de dire : non, c'est pas possible de jeter ça, c'est
neuf et on le récupère et on le met en œuvre là où on en a besoin."
Un exemple pratique : dans un Centre d'hébergement et de
réinsertion sociale géré par Emmaüs, en région parisienne, elles transforment les chambres collectives en chambres
individuelles :
"Une
fois par semaine, on se rend au Centre et on propose différents ateliers pour
toucher un maximum de personnes selon leurs centres d'intérêt. Par exemple, on
monte une maquette tous ensemble de l'existant pour rendre compte de ce qu'il y
a aujourd'hui et voir comment on pourrait le transformer. On a aussi un atelier
corps et bien-être pour justement s'installer dans les différents espaces du centre.
Et, par l'intermédiaire de la reprise de conscience de son corps, voir comment
il évolue dans l'espace du centre."
Comme on peut le constater, leur intervention ne se limite pas aux locaux, mais elle s'intéresse également à la relation entre les individus et les lieux qu'ils occupent. L’association
organise par exemple des activités autour du corps dans l’espace avec une danseuse, afin d'aider à mieux percevoir son environnement. Elle propose aussi des
ateliers avec un photographe, dans lesquels chaque habitant
inscrit la mémoire du lieu existant ainsi que l’utopie du lieu à construire.
Faire avec s'oriente vers trois types de publics et d'habitats :
1/ Les logements
individuels, avec des propriétaires occupants dits "précaires", qui ne sont pas en mesure
d'entretenir leur logement.
2/ Les
copropriétés dégradées.
3/ Les
centres d'hébergement, avec des occupants en phase de réinsertion, par le biais du passage des
chambres collectives aux chambres individuelles.
Avec des projets passionnants comme celui-ci, on constate qu'un
peu partout sont en train d'émerger des initiatives anti-gaspillage, qui impliquent les populations concernées, qui promeuvent une
nouvelle manière de tisser ou réparer du lien au travers de l'habitat et qui
évitent la destruction absurde de matériaux aptes à l'emploi.
Images : Illustrations de Joost Swarte / Gemeente museum / Den Haag / 2018
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